Wastewater-Based Epidemiology (WBE): Potential Application for Assessing the Use of Conventional and New Generation Tobacco and Nicotine Products

L’épidémiologie basée sur les eaux usées (EBE) est une méthodologie récente qui permet d’évaluer l’exposition et l’utilisation (intentionnelle) de toutes sortes de produits chimiques dans des populations définies (communautés) par l’analyse de biomarqueurs appropriés dans des échantillons d’eaux usées, qui sont généralement collectés à l’entrée des stations d’épuration des eaux usées (STEP) desservant cette population. L’EBE a également été appliquée pour déterminer l’utilisation de produits de style de vie contenant de la caféine, de l’alcool et de la nicotine à l’échelle mondiale. Cet article expose les principes méthodologiques de l’EBE et présente les résultats d’un examen systématique des études de l’EBE qui utilisent la cotinine comme biomarqueur dans les échantillons d’eaux usées pour évaluer la prévalence de la consommation de produits à base de tabac ou de nicotine. À cette fin, 60 études menées sur quatre continents (aucune étude n’a été réalisée en Afrique) ont pu être évaluées. Les consommations moyennes de nicotine calculées à rebours par l’EMOH se situent entre 2000 et 3000 mg/j/1000 personnes, avec d’importantes variations. Les données sur la consommation de nicotine dérivées de l’EMOH concordent généralement assez bien avec les résultats des méthodes « classiques » telles que les enquêtes, les statistiques (officielles), les données sur les ventes de cigarettes et les études épidémiologiques. Pour expliquer les écarts entre l’EMB et les méthodes classiques, les auteurs de l’étude ont le plus souvent évoqué l’utilisation de produits du tabac illicites, de produits de thérapie de remplacement de la nicotine (TRN), de cigarettes électroniques (CE), les biais de déclaration ou les statistiques obsolètes. Les études à long terme de l’EMB disponibles jusqu’à présent couvraient des périodes de 1 à 8 ans et montraient des tendances temporelles généralement constantes ou décroissantes pour la consommation de nicotine, en fonction du pays et de la période étudiée. Cette diminution est généralement inter-prétée comme une conséquence de la baisse des taux de tabagisme due aux activités de lutte antitabac. Dans quelques études, l’anabasine (AB), alcaloïde mineur du tabac, a été mesurée dans des échantillons de WW en tant qu’indicateur spécifique des produits contenant du tabac. Les résultats actuellement disponibles indiquent que l’anabasine dans les échantillons de WW diminue plus rapidement que la cotinine dans les échantillons de WW, ce qui suggère que l’utilisation de produits du tabac (principalement les cigarettes combustibles, CC) est progressivement remplacée par des produits à base de nicotine sans tabac tels que les produits NRT, les EC et d’autres produits.

Reprenant cette approche, nous avons effectué une simulation de Monte Carlo (MCS) en modélisant l’évolution sur 10 ans des concentrations de cotinine (indicateur de la consommation de (tout) produit à base de nicotine), d’AB (indicateur de la consommation de (tout) produit à base de tabac) et d’acide 2-cyanoéthyl-mercapturique (2CyEMA, indicateur de l’exposition au produit de combustion acrylonitrile, supposé provenir principalement de l’utilisation de CC) dans des échantillons d’eaux usées prélevés à l’entrée d’une STEP (hypothétique) desservant une grande ville. Les résultats des MCS pour deux scénarios simplifiés, mais, à notre avis, non irréalistes, ont révélé que les évolutions temporelles, en particulier celles des rapports de concentration WW AB/cotinine et 2CyEMA/cotinine, peuvent fournir des informations utiles sur les habitudes d’utilisation des produits du tabac conventionnels (CC et oraux) et des produits à base de nicotine sans combustion (EC, HTP, sachets de nicotine oraux, produits NRT) au sein d’une population au fil du temps. Ces changements sont le résultat net des transitions entre les groupes d’utilisateurs des différents produits du tabac et de la nicotine et les non-utilisateurs et permettraient donc de déduire le succès (ou l’échec) des mesures de réduction des méfaits du tabac (RDT) dans une population.

Sur la base des éléments présentés, nous concluons que l’EBM est un outil potentiel pour suivre les progrès de la THR dans les populations, à condition que des biomarqueurs appropriés soient mesurés dans des échantillons de WW collectés sur une période de plusieurs années.